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La réalisation du « palais de la Reine » s’est poursuivie sur 24 années, de 1859 à 1883. La Reine, décédée en 1877, n’a donc jamais habité dans cette construction qu’elle avait initiée.

Dans les années 70, elle est de plus en plus préoccupée par la lenteur des travaux. Ce qu’elle appelle « mon palais », ou bien « ma maison » a un aspect extérieur qui pourrait faire penser que l’immeuble est quasiment terminé. Mais en fait, l’intérieur est inachevé, et ce qui est réalisé se dégrade faute d’occupation et d’entretien.

Le 3 décembre 1874, elle écrit au Commandant Commissaire de la République d’une part pour savoir quelle somme, récoltée auprès des contribuables, sert à la poursuite des travaux, et d’autre part pour qu’il fasse « activer les ouvriers ». Cette lettre est une feuille de format 19,5×24,8 cm qui a été pliée en quatre pour l’envoi. Le recto porte l’adresse : « Na te Tomana te auaha o te Repupirita / Papeete ». Au verso, chaque page est séparée en deux colonnes, à droite en tahitien, à gauche en français (avec mention : « Pour traduction conforme, L’interprète Letourneau »).

Le Commandant Gilbert-Pierre ne répond pas immédiatement. Il prend ses renseignements auprès du Directeur des Affaires Indigènes et du Directeur des Ponts et Chaussées.

Dans une note de trois pages du 9 décembre 1874, ce dernier fait l’historique de l’entreprise. De 1859 à 1865, 90 000 francs ont été dépensés. Il n’est pas certain que cette somme ait servi uniquement à la construction du palais. Les travaux ont repris en 1874, avec un financement de 29000 francs. Il s’est surtout agi de travaux de remise en état.

Au début de 1875, un événement d’importance va donner un nouveau coup d’accélérateur : c’est le mariage du prince héritier Ariiaue avec la jeune Marau, 14 ans, fille cadette de Ariitaimai Salmon. Les travaux réalisés à la hâte, pour environ 10 000 francs, sont « du provisoire » : nettoyage des abords, peinture, pose d’escaliers provisoires donnant accès sur la véranda pendant les fêtes, et installation d’une cuisine, »sans que cela puisse profiter en rien à l’édification du palais ».

La réponse de Gilbert-Pierre à Pomare IV est datée du 13 février 1875. Le document conservé en est le brouillon. C’est un feuillet de 4 pages 20,2×30,6 cm. Les deux premières pages sont divisées en deux colonnes et le texte figure dans les colonnes de gauche. Il est précisé qu’une copie de la situation des recouvrements opérés et à opérer, ainsi que des travaux exécutés et restant à exécuter est jointe à ce pli. Si la Reine a dû « être satisfaite des travaux qui ont été terminés dans le rez-de-chaussée du palais pour le mariage du prince Ariiaue », elle ne doit pas oublier que la situation présente un déficit de 7 742,29 francs, et que les travaux ne pourront se poursuivre que s’il y a des fonds disponibles. Si le financement se concrétise, le Commandant assure que le palais pourra être achevé avant la fin de l’année.

Mais la Reine est fatiguée ; son entourage dépense sans compter. La priorité n’est plus au palais.

C’est Ariiaue qui recevra les clés du palais, des mains du Gouverneur de la colonie, le 21 juin 1883.

1874 12 03 Pomare IV À Commandant P1
1874 12 03 Pomare IV À Commandant P2
1874 12 03 Ab1 Commandant À Directeur Affaires Indigènes 1
1874 12 03 Ab2 Commandantà Directeur Affaires Indigènes
1874 12 08 A Commandant À Directeur Ponts & Chaussées
1874 12 08 B Commandant À Directeur Ponts & Chaussées
1874 12 09 A Dr Ponts & Chaussées À Com
1874 12 09 B Dr Ponts & Chaussées À Com
1874 12 09 C Dr Ponts & Chaussées À Com
1875 02 13 1 Lettre Du Commandant
1875 02 13 2 Lettre Du Commandant

Cette lettre est dactylographiée recto-verso sur les deux premières pages d’un feuillet de quatre pages, chacune de dimensions 21,7×28,1 cm. La première page est à en-tête. Il s’agit de la copie conforme d’une lettre écrite le 18 novembre 1902 adressée au maire de Papeete François Cardella (1838-1917). Cette copie fut rédigée au moins huit ans après l’original, car l’année pré-imprimée comporte un 1 à la place des dizaines.

Elle nous apprend que Cardella était franc-maçon dans cette loge depuis le 30 décembre 1868.

Cardella était arrivé dans le royaume de la Reine Pomare le 14 février 1866. La seule loge maçonnique existant alors s’appelait « Océanie française ».

Or, d’une part, cette loge ferma ses portes au début de l’année 1869, et d’autre part la loge « L’Océanie française » débuta officiellement en mars 1903. Cela semble signifier que, pendant 34 ans, les nombreux frères vivant en Océanie orientale pratiquaient leur maçonnerie en dehors d’une structure connue en métropole. Ils avaient un lieu de rendez-vous : on lit dans le JO des ÉFO, en 1889, que la société La Fraternelle se réunissait « au temple maçonnique, rue des Beaux-Arts ». Le nom de la loge fut à peine modifié. C’est le médecin Charles Albert Chassaniol (1843-1927), familier de la Reine Marau, qui signa (à l’encre bleue) cette lettre, en tant que vénérable.

C’était une lettre de soutien que « les membres de la loge maçonnique » adressèrent au maire à la suite des ennuis qu’il rencontra en 1902.

Le 23 août 1902, en effet, le gouverneur Petit l’avait suspendu, pour trois mois, de ses fonctions de maire, sans préciser les motifs. Il en fut fait mention officiellement longtemps après, dans le JO des ÉFO du 25 juin 1903 : « Considérant que le sieur Cardella, conseiller général sortant, n’était pas candidat, il n’en a pas moins adressé, le 21 août 1902 [la veille des élections pour le renouvellement des membres du Conseil général], aux électeurs de la première circonscription, une proclamation dont la violence a amené sa suspension comme maire […]» ». L’argumentation était bien mince. Précisons que le gouverneur Petit avait, selon les francs-maçons de l’époque, une femme « bigote fanatique », et il faisait tout pour lui plaire ainsi qu’aux « cléricaux catholiques acharnés à contrecarrer la fondation d’une loge maçonnique à Papeete ». Cardella avait été, comme il est rappelé à la fin de la lettre, un précurseur pour la laïcité, avec Victor Raoulx et Paul-Georges Martiny, tous les trois fondateurs en 1884 du journal politique hebdomadaire Le Messager de Tahiti.

Le 7 octobre, par décret, il fut révoqué définitivement. (C’est peu après que la lettre a été écrite.) Le 2 décembre, c’est Langomazino qui fut élu, mais il se considéra comme maire provisoire. D’ailleurs, il démissionna le 9 octobre 1903 et le 28 octobre, Cardella fut à nouveau élu maire de Papeete, fonction qu’il allait occuper jusqu’à sa mort en 1917.

Cette décision gubernatoriale était qualifiée « d’inique ». Elle « est digne d’un gouvernement autocratique et despotique et non d’une République libérale ». Et c’est un fait que le gouverneur était tout-puissant. La démocratie pratiquée en métropole était lettre morte dans la colonie.

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Cette lettre de la Reine Pomare et sa traduction ont été achetées sur un site Internet en 2013 par la Société des Études océaniennes, pour être ensuite cédée au S.P.A.A. Sa version française était parue en 1944, dans le n°71 du bulletin de la S.E.O., avec d’autres documents qu’un descendant de l’amiral Bruat avait prêtés au capitaine de corvette Jean Cottez. Il semble que ces documents aient été vendus, et c’est ainsi que cette lettre s’est retrouvée mise aux enchères par un collectionneur suisse. Elle a fait l’objet d’un court article dans le B.S.E.O. n°329 de septembre 2013.

Ce document comporte 2 feuilles manuscrites. La première est une feuille de 25,7×41,5 cm, pliée en deux. Le texte manuscrit en tahitien figure sur les pages 1 et 2 ; il n’y a rien sur les pages 3 et 4. L’ensemble porte des traces de pliures pour obtenir un format 10,5×12,8 cm.

Sur la seconde (21×27 cm) est écrite la traduction en français. En haut à droite, quelqu’un (?) a écrit : « copie de la main de l’amiral Bruat ».

Dans l’angle supérieur gauche figurent en relief les lettres A et B (en gothiques) surmontées d’une couronne

Comme pour toutes les « lettres de la Reine Pomare », il est fort probable qu’il n’y ait que la signature au bas du texte en tahitien (Pomare Arii) qui soit de la main de la Reine.

La guerre coloniale prend fin le 1er janvier 1847. La Reine est alors encore en exil volontaire à Raiatea. Elle n’est donc pas présente quand Bruat, ayant souhaité que la paix revenue soit honorable pour tous, fait organiser des festivités de réconciliation. Devant l’absence de la Reine, il envisage de procéder à l’annexion, mais il apprend par Ariitaimai (épouse d’Alexandre Salmon, amie et confidente de la souveraine) qu’elle souhaite revenir à Tahiti parce que les nouvelles reçues du pays la tourmentent beaucoup. Bruat autorise Ariitaimai à aller la chercher, avec le vapeur Phaéton. Elles arrivent à Moorea le 4 février. Bruat a compris que Pomare serait sensible aux formes extérieures de déférence, aussi, dès sa première entrevue, met-il trois fois un genou à terre pour lui rendre hommage. Le 9 février, ils traversent tous deux le chenal. Après avoir fait le tour de la rade pour q

ue tous voient qu’elle est bien à bord, le contre-amiral lui fait rendre tous les honneurs à son arrivée à Papeete : troupes en grande tenue, haie d’honneur, musique militaire, 21 coups de canon, présence des officiers, des chefs de service, des commandants des bâtiments, du Régent et des principaux chefs. Au mât du Phaéton flotte le drapeau du protectorat.

Elle reçoit l’hospitalité du gouverneur et de Madame Bruat. Elle se rend compte que Bruat est différent des portraits que les Anglais ont brossé de lui pendant son temps d’exil : c’est un homme de belle prestance et d’humeur joyeuse, qui va devenir un véritable ami, chez qui elle viendra prendre le thé en voisine …

Mais à Paris, on a considéré que les hostilités ont trop traîné en longueur, et le rappel de Bruat a été décidé depuis le 6 septembre 1846. Celui-ci va quitter Tahiti le 31 mai 1847 alors que son successeur, le capitaine de vaisseau Lavaud est arrivé le 21 du même mois.

C’est donc la veille de son départ que la Reine lui adresse cette lettre, répondant à l’invitation qui lui a été faite de dresser une liste de cadeaux qu’il lui serait agréable de recevoir de la part du gouvernement français et de son Roi Louis-Philippe. Elle demande de la vaisselle, de l’ameublement, de la décoration d’intérieur, du matériel de cuisine, des étoffes, des bijoux, une couronne d’or ; elle n’oublie pas son mari pour qui elle demande des épaulettes, et pour deux de ses fils, de jolis habits militaires.

Pomare IV avait pris l’habitude, dans les années 20 et 30, de recevoir des cadeaux à chaque passage de navires anglais ; les Français vont continuer cette tradition.

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Ce livre de format 12×18,5cm paraît en 1772. Il contient 550 pages et se compose de deux parties :

  • 1ère partie – pages numérotées de 1 à 250 : épitre au Roi (1 à 6), discours préliminaire (7 à 28), Voyage autour du monde 1ère partie contenant depuis le départ de France jusqu’à la sortie du détroit de Magellan (29 à 220), table des matières (221 à 226), explication des termes de marine (227 à 250)
  • 2ème partie – pages numérotées de 1 à 300 : Voyage autour du monde 2nde partie contenant depuis l’entrée dans la mer occidentale, jusqu’au retour en France (1 à 267), vocabulaire de l’isle Taiti (268 à 283), observations (284 à 289), table des matières (290 à 297), avis de l’éditeur (publicité, 298 à 300).

Après la défaite de la France au Canada (et la perte de Terre-Neuve), Bougainville propose au ministre Choiseul un plan d’exploration des terres Australes, comportant l’établissement d’un entrepôt aux îles Malouines, archipel connu depuis longtemps des marins de Saint-Malo qui l’ont ainsi baptisé. Ces îles doivent servir de base à l’exploration de l’Océan Atlantique vers l’Est, puis, si on ne trouve rien, vers l’Ouest, au-delà du Cap Horn. En 1763, Bougainville reçoit pour mission d’établir une colonie de peuplement aux Malouines. Il effectue deux voyages, installant 75 personnes. Mais l’Espagne proteste énergiquement, car elle revendique la propriété de ces îles au nom du traité de Tordesillas ! Choiseul cède et en 1766, Bougainville est chargé de procéder sur place à la remise de l’archipel aux Espagnols. De plus, Choiseul lui donne pour mission de poursuivre sa route vers l’Ouest, pour reconnaître les terres australes dans le Pacifique, puis les Moluques (pour les épices) ; il recherchera une île proche des côtes de Chine pouvant servir d’entrepôt à la Compagnie des Indes, fera une escale finale à l’île de France (pour savoir si la guerre n’est pas déclarée), puis rejoindra la France par le Cap de Bonne-Espérance.

L’ouvrage commence par un Discours préliminaire : « Énumération de tous les voyages exécutés autour du monde, et des différentes découvertes faites jusqu’à ce jour dans la mer du Sud ou Pacifique ». Cela part du voyage de Magellan (1519) jusqu’aux voyages de Dampierre (Dampier) (1701).

La première partie comporte quatre chapitres :

  • Nantes (1er départ le 15/11/1766, 2ème départ de Brest le 05/12 suite à des avaries causées par une tempête) – Montevidéo – Malouines / jonction avec les Espagnols pour la remise de l’archipel.
  • Malouines – Rio de Janeiro – jonction de La Boudeuse avec L’Étoile
  • Rio de Janeiro – Montevideo – Missions du Paraguay
  • Montevidéo – Détroit de Magellan dont il sort en janvier 1768.

La deuxième partie comporte sept chapitres :

  • Détroit de Magellan – Archipel dangereux (Tuamotu) – Tahiti
  • Séjour à Tahiti
  • Tahiti – nouvelles îles (Samoa) – Grandes Cyclades (Nouvelles-Hébrides)
  • Grandes Cyclades – Nouvelle-Bretagne (île de Papouasie-Nelle Guinée)
  • Port de Praslin (dans l’île Santa Isabel, aux Salomon) – Moluques – Boëro (Buru)
  • Boëro – Batavia (Jakarta)
  • Batavia – île de France (Mauritius) – Cap de Bonne Espérance – Ascension – Saint-Malo.

Bougainville termine ainsi son récit : « J’y entrai [à Saint-Malo] le 16 [mars 1768] après-midi, n’ayant perdu que sept hommes pendant deux ans et quatre mois écoulés depuis notre sortie de Nantes» .

À la fin du livre prennent place un vocabulaire et des observations sur l’articulation [la prononciation] de l’insulaire de la mer du Sud. Il s’agit d’Aotourou, Tahitien amené en France par Bougainville (observations faites par M. Pereire).

Ce tour du monde n’a quasiment rien rapporté au royaume de France. Cependant, la « découverte » de Tahiti (où Wallis est passé en juin 1767), avec le récit qui en est fait, demeure l’évènement de cette deuxième moitié du XVIIIè siècle, le siècle des Lumières qui a cru rencontrer dans cette « Nouvelle-Cythère » l’homme « à l’état de nature » tant célébré par les philosophes …

Le Feï est un journal de dimensions 21,5×29,3 qui parut à Papeete du 25 août 1919 au 18 avril 1921.

En manchette on trouve :

– la date, le numéro et le prix ;

– une image : du numéro 1 au numéro 5, ce sont deux bananiers fei, un grand et un petit ; ensuite, c’est un homme vêtu d’un pareu et d’un chapeau, porteur de deux régimes attachés à un solide rondin posé sur l’épaule gauche, maintenu de la main gauche, et la main droite posée sur la hanche droite ;

– le titre Le Feï, avec au-dessous : Bulletin bimensuel des Intérêts économiques des Établissements français de l’Océanie ;

– le prix de l’abonnement (demi-tarif pour “Les Soldats de la grande Guerre ») et le prix des annonces ;

– en exergue : “Par le bon sens – Par la bonne foi – Par la bonne volonté ».

La collection presque complète (il manque le n°21 du 17 mai 1920) est reliée sous une solide couverture cartonnée. Les trois côtés ouverts de ce volume sont carbonisés. L’explication de cet état est donnée dans la dédicace inscrite sur la deuxième de couverture : « À Bengt Danielsson qui a sauvé de l’incendie du petit fare en juillet 1981 une partie de ma bibliothèque tahitienne. Avec toute ma reconnaissance et bien amicalement. (signé) Pierre Jourdain[1] 31 octobre 1981 ».

Les pages ne sont pas numérotées. Il y en a 540.

Du n°1 au n°10 sont mentionnés deux noms : L. Pécastaing, rédacteur-fondateur et L. Juventin, gérant ; à partir du n°11, un seul nom : Tinau, gérant.

Le choix du mot fei est expliqué dans l’éditorial du n°1 intitulé “nos idées” : « Joyau de l’opulence nourricière et spontanée de Tahiti“, « emblème du pays, symbole de la facilité et de la simplicité d’existence, de la confiance en la certitude du lendemain qui dominent ici les actes et les sentiments». « Aimer le feï, c’est aimer Tahiti ».

Le rédacteur affirme vouloir se démarquer « des allures pamphlétaires qui ont presque toujours caractérisé la presse locale […] La vie moderne exige un journal, non pas de combat, mais d’affaires ». Il souhaite une « fusion plus intime des éléments indigènes et des éléments d’apport ».

Les sujets abordés dans ce périodique sont variés. En voici pêle-mêle une liste non exhaustive : la vie tahitienne (informations, chronique locale), la mercuriale de Papeete, la navigation, la rubrique nécrologique, des poésies, “Tahiti vu du dehors“, des réflexions politiques, le change monétaire, l’agriculture (« nos cocotiers », la vanille, l’apiculture…), la circulation et l’état des routes, les rôle des Poilus, le port de Papeete, les archipels, la plonge, des charges contre les Chinois, le village de ségrégation d’Orofara, des anecdotes historiques, des comptes rendus de manifestations (conseil municipal…), du courrier, le tourisme, l’enseignement. Il y a un article en tahitien par numéro et une « english column »..

Une place importante est accordée à la publicité.

Dans le recueil conservé au S.P.A.A. se trouvent deux feuilles encartées consacrées à « Nos glorieux Tahitiens », tel Théodore Coppenrath, “tué à l’ennemi le 27 août 1917” (14/06/1920). Dans un dossier des archives coté 41W31 se trouve un autre encart « Souscrivez à l’emprunt» avec le portrait du Gouverneur p.i. Jocelyn Robert, suivi d’un appel à la générosité de la population (08/03/1920)[2].

Mais Louis Pécastaing n’échappe pas à la mesquinerie ambiante ni aux polémiques.

Dans son n°41 du 7 mars 1921, il s’en prend au secrétaire-rédacteur de la Chambre de Commerce de Papeete qui a tardé à lui transmettre un Communiqué qu’il publie, en le faisant précéder de remarques peu diplomatiques : Ce retard “est le fait de l’inexplicable négligence du secrétaire rédacteur de ladite assemblée. Nous disons inexplicable pour ne pas dire intentionnelle, car le fait s’est déjà produit pour des communiqués du Conseil Municipal et de la Chambre d’Agriculture, dont il est aussi le scribe omniprésent. Si ce Monsieur avec lequel nous n’avons jamais eu le moindre rapport n’aime pas le Fei (ce qui est son droit), il doit néanmoins suivre les instructions qui lui sont données […] Il élague singulièrement dans ses comptes rendus les paroles de certains, tandis qu’il s’étend copieusement sur ce que dit un autre. Si donc il tient à conserver ses triples fonctions, qu’il veuille bien se contenter de les remplir à la satisfaction des intéressés et … du public.” L’intéressé (nous dit O’Reilly[3])), M. Malinowski, s’est jugé offensé et le provoque en duel. Pécastaing refuse cet affrontement.

Dans le n°42 du 21 mars, il règle ses comptes également avec Constant Deflesselle, notable de Papeete qui vient de faire paraître, le même mois, un nouveau journal : L’Écho de Tahiti (mensuel, puis bimensuel, qui durera un peu plus d’un an). Dans l’éditorial, il écrit : « Un confrère surgit, parce que nous n’avons pas voulu nous plier à des phobies et des théories que nous estimons absolument déplacées dans une petite colonie comme la nôtre où si peu d’éléments peuvent les comprendre et les discuter». Qu’a écrit Constant Deflesselle dans son éditirial du n°1 ? « Un seul journal paraissait jusqu’ici à Papeete et les personnes étrangères à Tahiti pouvaient croire que ce journal représentait l’opinion publique unanime ; or on sait à Tahiti qu’il n’en est rien. D’autre part, les Tahitiens voyaient avec regret ce même journal exposer des théories qui n’étaient pas les leurs, couvrir de fleurs des actes administratifs pas toujours exempts de reproches, faire concurrence au Journal Officiel pour distribuer des félicitations pas toujours méritées».

Plus loin, il semble qu’un article de l’Écho de Tahiti ait mis en cause le patriotisme de Pécastaing. Ce dernier affirme qu’il est « né de parents français, nés l’un en France, l’autre dans un consulat français, issus eux-mêmes de parents français, nés en France, et ainsi de suite, j’ai préparé l’École Polytechnique aux frais du Gouvernement français (Bourse nationale) […]»[4]

Mais ensuite, il fait référence à une décision parue au JO des ÉFO[5] dans laquelle était acceptée sa “démission de Soldat Français“. Or cette décision du Gouverneur fait référence à une lettre où il écrit qu’il est Espagnol, de parents espagnols… ?

Dans le dernier numéro (44), un petit encart signale la fin de la parution du Feï.

C’est encore Deflesselle qui écrit alors : « Un confrère vient de s’éteindre», ajoutant « il est mort de dépit, d’amertume et de fiel en hoquetant des imprécations contre le crétinisme et l’imbécilité de ses contemporains».[6]

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[1] Pierre Jourdain, 1901-1983, Capitaine de vaisseau, auteur d’ouvrages et d’aricles sur l’Océanie.

[2] Voir B.S.E.O. n° 338.

[3] O’Reilly, Bibliographie de Tahiti, Paris, 1967.

[4] Ces affirmations contredisent ce qu’écrit O’Reilly, le présentant comme étant “d’origine suisse” (Bibliographie de Tahiti, Paris, 1967).

[5] JO des ÉFO n° du 1er juin 1915, page 269.

[6] Cité par O’reilly, op.cit.

Ces deux documents sont insérés dans le recueil, pour l’année 1845, de la correspondance que le Ministre de la Marine et des Colonies, le baron de Mackau, adresse au nom du Roi Louis-Philippe au Gouverneur Armand Bruat à Tahiti.

Ils sont datés du 15 février 1845.

Dans le premier, le Ministre annonce que le Roi, ayant eu sous les yeux « les demandes que vous m’avez adressées en faveur des officiers et autres qui se sont distingués dans les combats qui ont été livrés à Taïti du 20 mars au 30 juin 1844 […] a bien voulu faire les nominations et promotions suivantes dans l’ordre Royal de la Légion d’honneur […] ». Suit une liste de onze militaires. « Je vous annonce en outre que […] le Roi a bien voulu nommer aussi chevalier de l’ordre Royal de la Légion d’honneur, le Chef Itoti, que vous m’avez désigné comme s’étant parfaitement  conduit dans le combat de Hapapé

Le second document est le duplicata du diplôme remis à Hitoti.

Hitoti (1770-1846) est chef à Teaharoa et Tiarei quand les Français établissent le protectorat.

C’est un personnage qui s’est déjà fait remarquer dans l’histoire tahitienne. Vers 1810, il s’est opposé, avec d’autres, à la volonté d’hégémonie de Pomare II. Entre 1811 et 1813, on le voit « élève » des missionnaires de la L.M.S. à Moorea.

À partir de 1829, avec d’autres chefs, il s’oppose à la jeune Reine Pomare IV qui montre trop de sympathie envers le mouvement Mamaia. En 1833, avec Tati et Paofai, il participe, à Taiarapu, à des combats qui voient la défaite des « rebelles » de la Mamaia.

En 1836, il se montre favorable aux missionnaires catholiques français (que la Reine, sur les conseils de Pritchard, fait expulser). Il s’entend avec Moerenhout, qui est devenu consul de France en 1838, et qui en fait un fervent partisan de la France.

En septembre 1842, avec Paraita, Utami et Tati, il appose sa signature sous celle de la Reine sur la sollicitation du protectorat adressée au Roi des Français.

Il est l’un des Grands Juges, Président de la Haute Cour indigène.

En mars 1844, il accompagne le Gouverneur Bruat, à bord du Phaéton, jusqu’à Taravao où des rebelles à la présence française (soutenus par la Reine et des résidents anglais) attaquent les installations militaires.

Les 29 et 30 juin, il participe aux combats de Haapape (Mahina).

Dans son rapport rédigé le 8 juillet et envoyé au Ministre, Bruat écrit à son propos :

« Je résolus de marcher sur Hapapé (pointe Vénus) […] Je rejoignis la colonne à Papana, où je retrouvai, ainsi que je l’avais ordonné, le chef de la police européenne et indigène, avec une vingtaine de naturels qui s’étaient joints d’eux-mêmes à nous, sous le commandement du chef Itoti, dont je signale le dévouement éprouvé à votre Excellence. […] Le chef Itoti s’étant parfaitement conduit, j’ai l’honneur de vous demander la croix pour lui : cette distinction méritée ne peut que produire un bon effet

On peut lire, dans un numéro de L’Illustration de 1848 (cité par O’Reilly dans Tahitiens) : « a vaillamment combattu dans nos rangs et est mort au service de la France le jour même où il recevait la décoration de la Légion d’honneur. […] Ses derniers instants ont été comblés par la pensée que l’œuvre qu’il avait contribué à fonder sortait enfin victorieuse des entraves qu’elle avait si longtemps éprouvées .» (Il faudra cependant encore toute l’année 1846 pour que les combats prennent fin définitivement.)

Hitoti est décoré « pour ses services » en général, mais le Ministre a ajouté en P.S. : « Cette faveur est aussi la récompense de votre belle conduite au combat de Hapapé

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Cette lettre de Pomare IV est une feuille de format 13,5×21 cm, écrite recto-verso en français.

L’écriture est appliquée, c’est peut-être celle de son fils.

La Reine avait conservé des liens avec Madame Bruat, qui avait quitté Tahiti avec son mari le 31 mai 1847. Un Tahitien, Tariirii, chef de Mahina, fit le voyage avec eux (il revint en 1849).

L’amiral Bruat aura eu un destin tragique : alors qu’il revenait de la guerre de Crimée, il contracta le choléra et mourut à bord du Montebello le 19 décembre 1855. (Il est inhumé au cimetière du Père-Lachaise.) La nouvelle fut connue à Tahiti. Voici ce qu’écrivirent des Tahitiens à Mme Bruat en 1857 : « Nous avons pleuré la perte immense que vous avez faite dans la mort de votre illustre époux et à nous notre vénéré Père et Protecteur. Bruat est mort. Nous n’avons plus en France de protecteur si ce n’est vous, Madame ; et l’Empereur qui a si bien apprécié Bruat et a si dignement su vous récompenser par la place que vous occupez près de son fils ».

En effet, en 1856, sa veuve avait été nommée gouvernante de la Maison des Enfants de France (institution créée en 1810 pour les enfants de la famille impériale).

C’était un titre purement honorifique. Le prince Louis-Napoléon, qui venait de naître cette même année, sera élevé par sa mère, l’Impératrice Eugénie. Madame Bruat (que l’on désigne par : « Son Excellence Madame la Gouvernante ») qui avait une voiture à sa disposition, venait tous les jours voir le Prince. Dans les cérémonies, sa charge l’appelait à porter l’enfant impérial.

Depuis 1847, les différents Commissaires auprès de la Reine Pomare avaient le souci de promouvoir la langue française chez les Tahitiens. En février 1847, Bruat avait suggéré au Ministre que « dans l’état actuel de tranquillité de nos établissements », il serait bon de « conduire en France où ils seraient instruits aux frais du Gouvernement, six ou huit jeunes gens, fils des principaux chefs du pays ». Fin 1847, huit jeunes furent envoyés en France, avec parmi eux Taatarii, qui fut nommé interprète du gouvernement à son retour. En 1860, le jeune Tehia (Teiha dans la lettre de la Reine), fils de Tariirii, fut envoyé chez les Frères des écoles chrétiennes à Passy. Il sera de retour à Tahiti à la fin de 1863.

En novembre 1862, le commandant Gaultier de la Richerie fit partir sept jeunes Tahitiens. Parmi eux : Tuavira, fils de la Reine, à destination du pensionnat Notre-Dame de Toutes Aides, près de Nantes, où ils arrivèrent le 27 février 1863. On peut penser que la lettre de Pomare IV avait fait le même trajet (sur la frégate l’Isis). La Reine souhaitait que son amie cherchât « une bonne école pour lui […], qu’il habite la même localité [que vous] et que vous soyez son bon soutien et sa bienfaitrice ». Elle lui recommandait aussi les autres garçons.

La présence de ces jeunes protestants dans une institution catholique allait susciter une vive polémique en France. Mais la Reine voulait que son fils restât chez les Frères. S’adressant au Supérieur général, elle écrivait : « Fais bien connaître à l’Empereur ma volonté formelle : que mon enfant reste entre tes mains à Nantes ». Les autres jeunes Tahitiens ne souhaitaient pas aller chez les protestants. Tuavira passera ses hivers dans le Sud-Ouest. À ce sujet, on peut lire dans le Supplément au n°15 du Messager de Tahiti du 10 avril 1875 : « Son séjour en France a été marqué par un épisode intéressant. Le 6 janvier 1864, le marquis de Bertrand-Moleville, petit-fils du ministre de l’infortuné Louis XVI, donnait au jeune et royal écolier et à ses cinq compagnons, une fête dans son château de Ponsan[1]. C’est là que Joinville a vu pour la première fois ce produit de notre climat, la glace. Curieux de toucher cette merveille qui lui était inconnue, il courait, se précipitait vers cette nouveauté qui frappait ses regards et dont la formation lui semblait magique. Un arbre fut planté à cette occasion aux abords du château, comme témoin durable de sa visite et de l’affectueuse hospitalité qu’il y avait reçue ».

La Reine ayant souhaité que son fils fût présent au mariage de sa sœur, la Reine de Bora Bora, ils rembarquèrent le 3 juin 1865 à Brest sur la Néréïde. Leur voyage les fit passer par Le Cap, La Réunion, Madagascar, Sydney, la Calédonie et Tahiti où ils arrivèrent le 14 février 1866.

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[1]     Dans le Gers.

Le numéro 1 de L’Ophicléide, “Journal humoristique de Tahiti”, parut en juin 1886 à Papeete. Des élections au Conseil Général devant avoir lieu le 13 juin (il y est fait allusion plusieurs fois dans ce journal), on pourrait situer cette parution dans le premier tiers du mois, et même avant le 9[1]. Mais en page 3, des “informations” sont datées du 13 juin 1/2 (sic) et du 14 juin !

Il n’y eut pas de n° 2, ainsi que ses rédacteurs le pressentaient dans leur “profession de foi” : « Et si le jour qui le voit naître le voit aussi mourir, il aura toujours eu la satisfaction intime d’avoir dit au moins une fois la façon de penser de ses rédacteurs… et c’est quelque chose !».

C’est un journal de quatre pages, de grand format 28 x 41,5 cm. Son contenu se présente sur deux colonnes, excepté pour les publicités sur la deuxième moitié de la page 4.

La manchette propose un certain nombre d’indications amusantes, laissant à penser que l’on a affaire à une production de potaches. Le titre, placé en diagonale, est étrange. Un ophicléide est un instrument de musique à vent, de taille imposante, de la famille des cuivres, et qui est déjà en désuétude dans les années 80 du XIXème siècle, remplacé peu à peu par le tuba.

Le choix de ce nom est expliqué plus loin : « Nous aurions pu appeler cette feuille, dont l’apparition sera l’une des gloires du XIXème siècle (siècle déliquescent !), aussi bien Le Carillon, La Clochette, Le Bourdon, etc…etc. Nous avons choisi le nom d’Ophicléide parce que si La Cloche abuse de son cuivre, nous pourrons toujours jouer de notre instrument… avant ». Il est clairement fait allusion au journal La Cloche, dont le n° 1 était sorti peu avant, le 25 mai de la même année. La suite de l’explication repose sur un jeu de mots : « Notre titre nous donne aussi le droit de nous comparer à la divinité elle-même […] car si Dieu fit le monde en six jours, il ne faut pas perdre de vue qu’O FIT CLÉIDE en 6 bécarres »[2]“.

Qui sont les créateurs de cette publication ? O’Reilly[3] écrit qu’elle semble être “l’œuvre de deux avocats de l’époque : Langomazino fils et J. Texier”.

Hégésippe Langomazino (1844-1911) était un défenseur (avocat) qui avait pris la succession de son père Joseph Langomazino décédé en 1885.

Jules Texier (1858- ? ) était aussi un défenseur. Il avait épousé en 1886 Marie-Antoinette Brault (1867-1953), sœur de Léonce Brault. Il était reparti en France après avoir divorcé.

Leur nom n’apparaît pas ; il y a seulement une mention signée de La Rédaction : « Si tu veux savoir mon nom, mon cordonnier l’a mis sous ma semelle ».

Le Comité de Rédaction est : TOUT-LE-MONDE.

La Direction et l’administration sont au nom d’un certain WITAS, rue de Bréa. On trouve dans le BO des ÉFO de 1886, au 14 décembre : M. Witas est nommé agent du service actif des contributions à Papeete en remplacement de M. Charles .

Le reste de la manchette est à l’avenant :

On ne s’abonne nulle part.

Journal en Scie bécarre.

Prix du numéro : 1 franc – 0,50 pour les Bonnes d’Enfants, les Militaires non gradés, et les personnes atteintes de “feefee”. Gratis pour les individus justifiant du mal de “macaque”[4].

Presque illustré quoique peu judiciaire – Un tantinet poétique – Légèrement politique – Nullement commercial – Mais d’annonces.

Paraissant de temps en temps.

Les journaux de ce temps adoptaient tous une formule latine. Pour L’Ophicléide, ce fut : Et nunc erudimini qui judicatis terram. Il s’agit d’un extrait de la Bible, psaume 2.10, dont la formulation précise est : Et nunc reges intelligite erudimini qui judicatis terram : « Et maintenant, rois, comprenez, corrigez-vous, juges de la terre !

On trouve aussi, dans la profession de foi, une justification de la date de parution : « L’Ophicléide a choisi le mois de juin pour sortir du chou, parce que ce mois est sous le signe zodiacal du Cancer, et que comme lui l’Ophicléide trop pique ». Ce jeu de mots se comprend mieux quand on sait qu’une partie de la racine grecque de cet instrument – ophis – signifie serpent.

En page 2, on peut lire, sur deux colonnes et demie, le seul article “sérieux” pour lequel ce numéro semble avoir été destiné. Il s’agit d’un réquisitoire contre l’arrêté du 17 mai 1886 et contre son rédacteur, le Chef du Service judiciaire, le Procureur de la République par interim Pissarello. C’est un texte portant « réorganisation du corps des défenseurs, et réglant l’exercice du droit de défense des parties devant les tribunaux de la colonie »[5].

L’auteur de l’article, après un long développement, estime que ce texte est inopportun et « qu’il assimile les défenseurs à des collégiens qu’on met au pain sec pendant quinze jours quand ils n’ont pas été bien sages ». Assurément, le Procureur p.i. Pissarello est en conflit avec au moins un défenseur « qui possède un nez qui déplaît au ministère public ».

Le journal fait état de la rumeur selon laquelle ledit Pissarello pourrait être nommé titulaire de son poste.

À la rubrique “Âneries Ultra-Bécarres“, on lit cette information qui égratigne trois personnalités :

Il est question de l’installation de bancs sur la place du gouvernement. Il est certain que le beau naît (Frédéric Auguste Bonet, défenseur, qui fut élu le 13 juin au Conseil Général) dans la Colonie. Mort à qui nie (Dauphin Moracchini, Directeur de l’Intérieur, Gouverneur par interim) ce fait dont l’évidence s’impose à tous. Nos administrateurs nous paraissent désormais plus précieux que le diamant, car celui-ci, en effet, ne raie que le verre, tandis que pour le banc, c’est pis, ça raie l’eau (Pissarello, Procureur).”

Ça ne vole pas haut.

Le directeur de La Cloche, Gaston Cognet, est pris à partie. Outre l’annonce de sa future nomination comme défenseur, il est fait allusion à son refus de se battre en duel suite à un article paru dans son numéro 1.

Quatre personnages sont présentés comme candidats de Papeete aux élections générales, mais ils ne sont désignés que par des surnoms : Cyclope, dit Cherche-Oreilles ; Mac-Aroni, dit Jambe-de-Coton, Violet, fabricant de pipes, et Bloum-Pudding. Il est tentant d’y voir les quatre élus : Bonet, Cardella, Langomazino et Liais. Dans la rubrique “Avis” en dernière page, on retrouve trois de ces sobriquets dans deux annonces fantaisistes :

– Il a été perdu une caisse de pipes Violet – La rapporter à l’usine Bloum-Pudding, à S. Francisco – Récompense au net.

– Spécialité de “Lapins pour Dames” – S’adresser à Mac-Aroni, à Papeete.

La rubrique “Mouvements du Porc” (port) est aussi fantaisiste que le reste, avec “Guère de navires entrés” (au lieu de navires de guerre), etc.

Deux articles se rapportent aux élections. L’un, signé Léo Delpech, “Candidat Larmoyant“, propose “l’Union des Peuples, sous les auspices d’une divinité souveraine : Inclinons nos fronts poudreux devant la PENSÉE LIBÉRALE“.

L’autre, signé Mouchy, “candidat Va-nu-Pieds” propose un programme en trois points : “Je soutiens l’hôpital chinois, la Direction de l’Intérieur, l’asile des aliénés, toutes institutions très-salubres“.

Il y a encore bien d’autres passages qui se veulent humoristiques…

Journal de circonstance (à la veille d’une élection), sans lendemain, on ne sait pas à quel nombre d’exemplaires il fut tiré, ni s’il suscita de l’intérêt – et auprès de qui ? Ses auteurs s’en désintéressèrent-ils très vite ? Y eut-il des pressions pour les faire taire ?…

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[1]     À la page 3, il est dit, dans la rubrique “Informations” : « On parle de la nomination de M. J-T. Cognet, agent  d’affaires, comme défenseur ». Or la décision, en date du 9 juin, paraît au JO des ÉFO du 10 juin.

[2]     Bécarre : signe qui indique sur une partition qu’il faut restituer sa hauteur naturelle à une note précédemment altérée (diésée ou bémolisée). Cléide était une des trois nymphes ayant élevé Bacchus sur l’île de Naxos.

[3]     O’Reilly, Bibliographie de Tahiti, Paris, 1967.

[4]     Mal de (la) macaque : une bronchite.

[5]     JO des ÉFO du jeudi 20 mai 1886.

Cette belle collection des voyages du capitaine Cook se compose de 8 volumes de format 25×30 cm,  numérotés de I à VIII, et d’un grand atlas de format 42×56 cm.

Le premier voyage de Cook a pour objet de faire « des découvertes dans l’hémisphère Sud ». Il est raconté dans les volumes II et III, tandis que le premier volume est consacré aux voyages d’exploration de Byron (1764-1766), Wallis (1766-1768) et Carteret (1766-1769).

C’est un voyage d’exploration du Pacifique, avec un but : retrouver Tahiti (dont Wallis vient de révéler l’existence) pour y observer le passage de Vénus devant le soleil. Il embarque donc, fin 1768, à bord de l’Endeavour, avec une équipe de scientifiques.

Il entre dans l’Océan Pacifique par le Cap Horn. Il traverse les Tuamotu, puis, du 13 avril au 13 juillet 1769, il séjourne à Tahiti, où il fait installer un observatoire « Pointe Vénus ». Son parcours le mène ensuite aux îles Sous-le-Vent, à Rurutu, en Nouvelle-Zélande (dont il fait le relevé des côtes), en Nouvelle-Hollande (Australie), en Nouvelle-Guinée, en Indonésie. Il rentre en Angleterre, par le Cap de Bonne Espérance, en août 1771.

*Le deuxième voyage est dirigé « vers le pôle Sud et autour du monde ». À bord de la Resolution, et accompagné de l’Adventure (Capt. Furneaux), Cook s’élance en juillet 1772. Il traverse l’Océan Indien depuis le Cap de Bonne Espérance. Il cherche le continent austral. Puis, après les îles Crozet, il entre dans l’Océan Pacifique par le Sud de la Tasmanie. Son parcours le mène en Nouvelle-Zélande, aux Tuamotu, à Tahiti (17/08-17/09/73), aux Tonga, en Nouvelle-Zélande, dans les parages du continent antarctique (jusqu’à 71°10′ de latitude Sud), à l’île de Pâques, aux Marquises, à Tahiti (04/74) et aux îles Sous-le-Vent, aux Fidji, aux Nouvelles-Hébrides, en Nouvelle-Calédonie, en Nouvelle-Zélande. Il rentre en Angleterre, par le Cap Horn, en juillet 1775.

*Le troisième voyage a pour but de faire « des découvertes dans l’hémisphère Nord », et plus particulièrement de voir s’il existe un passage Nord entre le Pacifique et l’Atlantique. À bord de la Resolution, accompagné du Discovery (Capt. Clerke), il part en juillet 1776. Après le Cap de Bonne Espérance et un passage par les Kerguélen et la Tasmanie, il arrive en Nouvelle-Zélande en février 1777. Puis il passe aux Cook, aux Tonga, à Tahiti (08/77), Hawai’i, la côte Nord-américaine jusqu’en Alaska, le Détroit de Béring, Hawai’i à nouveau, où il est tué le 4 février 1779. L’expédition continue sans lui : Kamtchatka, Détroit de Béring, Japon, Chine, Océan Indien et retour en Angleterre le 4 octobre 1780. Les volumes I et II de ce troisième voyage sont écrits par Cook, le troisième volume par le Capt. James King. Ils sont accompagnés d’un atlas comprenant 2 cartes et 60 gravures (alors que pour les 2 premiers voyages, les illustrations sont incluses dans le texte).

Ces récits des voyages restent la base des connaissances que nous avons sur les Polynésiens du temps des premiers contacts. Humaniste du temps des Lumières, Cook est un observateur attentif et rigoureux. Les gravures qui accompagnent ses textes sont universellement connues. Il est le premier à avoir cartographié, avec une précision étonnante, les contours de Tahiti. Sa contribution à l’histoire des îles de la Société (c’est lui qui leur a donné ce nom) et des îles Marquises est fondamentale.

Ces livres sont un des fleurons de la bibliothèque du S.P.A.A.

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La biographie sommaire présentée ci-dessous (sous toutes réserves) semble être celle qui correspond le mieux à ce personnage difficile à retrouver dans l’Histoire.

Ismaïl Hakki serait né en 1883 à Istanbul, et décédé en juin 1923 à Kashan.

Il entre à l’École de guerre en 1899 et en sort lieutenant en 1902.

Il suit une formation dans l’armée française en 1910-1911. (En 1909, Mustapha Kemal – futur Ataturk- a aussi participé à des manœuvres militaites en Picardie.) Il parle français.

Il participe à la guerre de Libye (guerre de l’Italie contre l’Empire Ottoman, 1911-1912), à la première guerre balkanique (Alliance de la Serbie, de la Bulgarie, de la Grèce et du Monténégro contre l’Empire Ottoman, 1912-1913) et à la « Guerre de Libération » (1919-1922) aux côtés de Mustafa Kémal, conflit qui aboutit à la chute du sultanat turc.Il meurt avec le grade d’inspecteur de la gendarmerie.

A-t-il rejoint la formation politique des « Jeunes-Turcs » ? C’est un mouvement né le 14 juillet 1889, rassemblant de jeunes militaires turcs qui s’opposent au Sultan et souhaitent une « occidentalisation » de leur pays. Leur devise est : Liberté, Égalité, Fraternité. Ils ont des liens avec le Grand Orient de France. En 1907, ce mouvement prend le nom de Comité Union et Progrès (CUP).

À partir de 1908, l’Empire Ottoman s’enfonce dans l’anarchie. Le CUP prend le pouvoir en 1913. Mais la désunion y règne, opposant fédéralistes et unionistes, lesquels veulent un état centralisé et unitaire. Ces derniers l’emportent, et sont à l’origine d’une répression sur les minorités. Plus particulièrement, à partir de 1915, commence le génocide arménien.

Il est difficile de dire si Ismaïl Hakki bey a pris une part active à ce génocide. Les informations sont difficiles à recouper, et parfois contradictoires. Dans le cadre des recherches sur les responsables de ces massacres, on trouve un Hakki Bey qui meurt en février 1915 (il se prénommerait Ibrahim). On en trouve un autre responsasable de la mort de 2 000 enfants arméniens le 24 octobre 1916 à Deir ez-Zor, mais une autre source dit qu’à ce moment et à cet endroit, c’est un certain Zeiki bey qui est sur place…

La demande est assez étonnante : quel intérêt un militaire turc a-t-il de vouloir connaître, en 1906, le nombre d’habitants dans les É.F.O., et la proportion de « mahométans » (musulmans) ? De plus, il demande quel est le ratio sunnites/chiites et, enfin, leur nationalité.

C’est à la Conférence de La Haye en 1907 que les délégations françaises et anglaises échangent sur lui des renseignements. On apprend que ce personnage, qui a la fonction d’aide de camp dans la garde personnelle du Sultan, est le fils du Ministre des Affaires étrangères ottoman. Ce dernier confirme que son fils rassemble des données sur les populations musulmanes des colonies françaises, anglaises et hollandaises. Ainsi, en 1906, il envoie des demandes de renseignements également en Tunisie, au Dahomey, au Niger et Haut-Sénégal, en Mauritanie et au Congo français. Les responsables de ces territoires ne donnent pas suite à ces demandes. (1)

Le Gouverneur Jullien, lui, répond avec précision : 29 865 habitants dans les É.F.O. au recensement de 1902, aucun mahométan. Il ne semble pas que cette collecte de données ait été suivie d’une quelconque action.

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(1) D’après J.M. Landau, Pan-Islam, History and Politics, 2015.