Deux lettres de la reine Pomare du 11 décembre 1873 au Commissaire-Commandant de la République

Les deux lettres, qui portent la signature de Pomare, sont en bon état. Chacune se présente sous la forme d’une feuille de format 20,5×26,5 cm pliée en deux, ce qui donne quatre pages. La première lettre est écrite sur trois pages, la deuxième sur quatre. Ces pages sont encadrées d’une bordure noire. Elles sont chacune accompagnées de leur traduction, sur des feuilles différentes.

Elles ont été rédigées dans le contexte suivant.

En 1871, dans une « Note au sujet de la construction du palais de la Reine », le Directeur du Génie et des Ponts et Chaussées écrivait : « Ce palais fut commencé en 1859 avec les propres ressources de la Reine et sous sa direction, avec le concours officieux de Mr Duval, Garde du Génie. Les travaux continuèrent ainsi jusqu’au 31 janvier 1862, époque à laquelle un arrêté de Mr le Commissaire impérial plaça officiellement cette construction sous la direction du Directeur des Ponts et Chaussées, mais toujours avec les ressources de la Reine. Jusqu’au 31 mars 1864 il a été dépensé 88.326,78 f. Ce n’est qu’en 1864 qu’une subvention annuelle de 10.000 francs commence à être mise au budget local, elle continue de l’être jusqu’en 1868 ; mais les travaux ayant été arrêtés le 1er avril 1865, à partir de cette époque la subvention, bien qu’inscrite au budget, n’y fut pas consacrée. » Le « gros œuvre » est terminé, mais tout l’aménagement intérieur reste à faire. En 1866, du beau mobilier, envoyé par l’Empereur, a été réceptionné – au grand déplaisir du Commandant qui considère que c’est du gaspillage – pour ce palais encore en chantier.

En fait, en 1865, 4 159,91 francs ont été dépensés pour le palais. Le reste de l’argent, jusqu’en 1868, va disparaître en frais de fonctionnement de la maison de la Reine : factures des commerçants de Papeete, jeu, fêtes, domesticité, enfants … En 1868, à la ligne « Aide à la construction du palais de la Reine », dans le budget de l’année, aucune somme n’est mentionnée, de même pour les années suivantes, avec cependant la mention « mémoire ».

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Les travaux vont reprendre en 1874.

Entre 1868 et 1874, un certain nombre d’événements se sont produits. Le Commandant La Roncière, avant de quitter ses fonctions, avait voulu redonner à la Reine des prérogatives perdues. Son successeur eut bien du mal à faire admettre qu’il était impossible de revenir en arrière. Puis l’Empire fit place à la République et la Reine afficha à l’occasion son attachement au nouveau système de gouvernement français. En 1872 et 1873, trois décès viennent endeuiller la famille royale : sa petite-fille, dont elle disait qu’elle lui succéderait (fin décembre), sa fille, Reine de Bora Bora (16 février), et son mari le Prince Ariifaite (6 octobre). Le moral de la Reine est au plus bas. Le Commandant Girard lui propose de l’accompagner dans sa tournée autour de l’île, du 16 au 30 octobre. Pomare semble enchantée de cette promenade.

Alors que Girard est en tournée aux Tuamotu du 17 au 27 novembre, la Reine tente de reprendre la main sur la construction de son palais. D’une part elle demande au Directeur des Ponts et Chaussées de lui en remettre le plan ; d’autre part elle concocte avec les chefs de Tahiti et de Moorea un programme d’impôts nouveaux pour financer les travaux, et elle demande au Directeur des Affaires indigènes de faire insérer cette mesure fiscale dans le Messager de Tahiti. Mais rien à l’époque ne se fait sans la signature, à côté de celle de la Reine, du Commandant Commissaire de la République. Devant le refus du premier et l’oubli du second, elle écrit à Girard le 11 décembre. Elle compte sur les liens de sympathie qui se sont créés entre elle et le représentant de l’État, son « cher ami ». Elle joue aussi sur le registre de la pitié : « Je suis veuve. Je vous prie donc de venir à mon aide ». Elle sait que ce Commandant doit bientôt être remplacé (Il le sera le 30 mai par Gilbert-Pierre), et elle voudrait profiter de ses bonnes dispositions pour faire repartir la construction.

Elle a raison, car Girard accède à ses volontés : le 22 janvier 1874, une ordonnance fixe « le taux d’une contribution pour l’achèvement du palais de la Reine ». De plus, par un arrêté du 16 mars, une avance de 10 000 francs (remboursables) prélevés sur les fonds de réserve est faite à la Caisse indigène.

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